POINT DE VUE D‘EXPERTS

LETTRE FISCALE

La retenue à  la source de l‘impôt sur le revenu est un sujet ancien, on l‘évoque depuis les années 30. Régulièrement relancé, régulièrement enterré, il semble devoir prendre corps à  l‘initiative du Président de la République.

C‘est une modalité contemporaine de prélèvement de l‘impôt, la majorité des pays de l‘OCDE l‘ont adoptée. Cette nouvelle modalité ne supprimera pas l‘établissement de la sempiternelle déclaration de revenu, mais permettra à  près de 95% des contribuables de payer leur impôt au fur et à  mesure de l‘acquisition du revenu et non plus avec un décalage d‘un an.

La charge sera une fois de plus supportée par les entreprises (pour leurs salariés), et l‘impôt sur le revenu deviendra indolore pour le contribuable, à  l‘instar de la TVA et de la CSG.

Savez-vous que la TVA rapporte 2,5 fois l‘IRPP, et que la CSG rapporte 1,3 fois l‘IRPP…

Pour ceux qui seraient tentés d‘optimiser leur imposition, sachez que l‘administration prévoira, à  l‘instar de ce qui s‘est déjà  fait dans d‘autres pays, des « garde-fous » pour éviter que des revenus exceptionnels échappent à  l‘impôt. Une déclaration des revenus de 2017 permettra de vérifier, et de redresser le cas échéant, de telles situations.

Un petit clin d‘œil à  ceux qui envisagent de faire valoir leurs droits à  la retraite, choisissez bien votre date de départ…

Bonne lecture Le Pôle Fiscal

MARS 2016

MARS 2016

I. GENERALISATION DU PRELEVEMENT A LA SOURCE

Le Ministre des finances et des comptes publics, et le Secrétaire d‘Etat chargé du budget, ont présenté, le 16 mars 2016, une communication relative à  la généralisation du prélèvement à  la source au titre de l‘impôt sur le revenu.

La réforme devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2018 et bénéficierait à  la quasi- totalité des français, salariés, fonctionnaires, retraités, bénéficiaires de revenus de remplacement (indemnisation chômage), indépendants et propriétaires percevant des revenus fonciers, étant précisé que les impositions liées aux revenus de capitaux mobiliers et aux plus-values immobilières sont déjà  prélevées à  la source.

Pour les contribuables dont le revenu est constitué de traitements et salaires ou de revenus de remplacement, l‘impôt sera prélevé par les tiers versant le revenu (employeurs et caisses de retraite).
Pour les travailleurs indépendants, l‘impôt sera versé sous forme d‘acomptes, selon des modalités proches de celles existant aujourd‘hui. Ces modalités seront également appliquées aux revenus fonciers perçus par les propriétaires.

Concrètement, en 2017, rien ne changera, l‘impôt sera acquitté sur la base des revenus 2016.
Les contribuables et les organismes concernés recevront néanmoins à  l‘automne 2017 le taux de prélèvement qui devrait s‘appliquer aux revenus perçus à  compter du 1er janvier 2018.

Au vu des premiers éléments communiqués, il semblerait que les revenus mentionnés ci-dessus perçus en 2017 ne soient pas taxés. Il convient d‘être vigilant sur l‘évolution des revenus entre 2016 et 2017, l‘administration se réservant un droit de regard sur d‘éventuelles « optimisations fiscales agressives ».

MARS 2016

II. CALENDRIER DE DEPOT DES DECLARATIONS D‘IMPOT SUR LE REVENU

La date limite de souscription de la déclaration 2042 et de ses annexes est fixée au mercredi 18 mai à  minuit.

Pour les déclarations souscrites par internet, cette date limite est reportée :

  • « Mardi 24 mai pour les départements nos 01 à  19,

  • « Mardi 31 mai pour les départements nos 20 à  49 et

  • « Mardi 7 juin pour les départements nos 50 à  974/976.

    Cette année, les non-résidents devront, quel que soit leur lieu de résidence hors de France, souscrire leur déclaration dans le même délai que les contribuables domiciliés en France, soit au plus tard le 18 mai pour la déclaration sous forme papier et le 7 juin pour la déclaration en ligne.

    Pour mémoire, la Loi de finances pour 2016 a instauré une obligation de souscription de la déclaration d‘impôt sur le revenu en ligne. Ainsi, pour les contribuables dont le revenu fiscal de référence au titre des revenus 2014 est supérieur à  40.000 euros doivent en principe, dès cette année, souscrire leur déclaration sur le site www.impots.gouv.fr.

    III. ASSURANCE-VIE : ABANDON DE LA DOCTRINE BACQUET

    La réponse ministérielle Ciot du 23 février 2016 précise que l‘abandon de la doctrine Bacquet s‘applique aux successions ouvertes à  compter du 1er janvier 2016.

    En conséquence, si civilement la valeur de rachat d‘un contrat d‘assurance-vie souscrit avec des deniers communs et non dénoué lors du décès de l‘époux bénéficiaire entre dans les opérations de liquidation de la communauté et de la succession, fiscalement, cette même valeur n‘est plus soumise aux droits de succession.

    Cette dernière n‘est donc pas intégrée à  l’actif de la communauté conjugale lors de sa liquidation, et ne constitue donc pas un élément de l’actif successoral pour le calcul des droits de mutation dus par les héritiers de l’époux prédécédé.

    En revanche, lors du dénouement du contrat à  la suite du décès du second conjoint, les sommes versées aux bénéficiaires de l’assurance-vie restent soumises, suivant le cas, aux droits de mutation par décès ou au prélèvement particulier, dans les conditions de droit commun.

MARS 2016

IV. EVALUATION FISCALE D‘UN IMMEUBLE EN INDIVISION

Pour le calcul de l‘ISF, les biens immobiliers sont en principe retenus pour leur valeur vénale.
Certains facteurs de dépréciation sont admis tant par la loi que par la jurisprudence.

S‘agissant de biens détenus en indivision, la Cour de cassation (dans un arrêt rendu le 16 février 2016) a clairement précisé que la valeur vénale des droits indivis est spécifique et ne se confond pas avec la quote-part de la valeur vénale totale qu‘aurait le bien s‘il n‘appartenait qu‘à  un seul propriétaire.

Il résulte de cette jurisprudence que l‘administration fiscale qui entend remettre en cause la valeur déclarée par le contribuable doit, conformément à  la règle générale, fonder sa propre évaluation sur des éléments de comparaison tirés de la cession de biens intrinsèquement similaires (biens indivis).

Il peut être dérogé à  cette méthode comparative lorsqu‘il n‘existe pas de biens similaires ou qu‘il n‘y a pas de marché du type des biens en cause.

En conclusion, la décote pour bien loué se cumule donc avec la décote applicable aux biens indivis ou en société.

V. FINANCEMENTPARTICIPATIF: REGIME FISCAL DE LA SOCIETE BENEFICIAIRE

Le financement participatif est une nouvelle source de financement en provenance du grand public. Il permet aux porteurs de projet de faire appel au don, au prêt (crowdlending) ou à  l‘investissement en capital (crowdequity), selon le type de projet et le degré de maturité de l‘entreprise, pour financer le développement de celle-ci.

Ainsi, afin de mesurer les conséquences fiscales de cette nouvelle source de financement, nous vous proposons une synthèse des enjeux fiscaux en fonction du porteur du projet (cinématographique en l‘espèce).

MARS 2016

Montant de la contribution

Contribution à  5€

Contribution à  10€

Contribution à  20€

Contribution à  50€

La personne reçoit en échange une contrepartie symbolique constituée par son nom au générique du film: dans la mesure où ce nom au générique figurera parmi beaucoup d’autres noms, cette contrepartie est tout à  fait symbolique

La personne reçoit en échange une photo dédicacée par l’ensemble de l’équipe du filmet a son nom au générique.

La personne reçoit en échange un DVD du film, une photo dédicacée et a son nom au générique.

La personne reçoit en échange un t-shirt, un DVD du film, une photo dédicacée et a son nom au générique.

Porteur du projet

       

Association d’intérêt général ou assimilé

La transaction est un don

Il y a une disproportion marquée entre la contrepartie (qui n’a pas de valeur marchande) et la somme d’argent reçue => don

La valeur marchande d’un DVD étant d’environ 10€, la contrepartie excède 25% de la somme d’argent versée. Ni la notion de disproportion marquée, ni celle de « close to nothing » ne sont remplies => vente

L’analyse est la même que pour le palier à  20€: dans le commerce un t- shirt et un DVD serait sans doute vendus a minima pour 20€. Cela excède donc le quart de la somme reçue et n’est pas « proche de rien » => vente

Personne physique, société commerciale, association qui n’est pas d’intérêt général

La transaction semble être une vente mais la contrepartie étant tellement symbolique qu’on pourrait considérer qu’il s’agit d’un don. Le Comité TVA de la Commission Européenne laisse la latitude aux Etats Membres (« close to nothing ») et l’administration fiscale française n’a pris aucune position.

Il y a une contrepartie fournie, donc il semble difficile de dire qu’elle est « proche de rien » (Photo = support physique) => vente

VI. BREVES

6.1 ABSENCE DE DELAI COMPLEMENTAIRE POUR LE DEPOT DES DECLARATIONS DE RESULTATS

Il n‘existe plus de délai supplémentaire de 15 jours pour la transmission TDFC des déclarations, au titre de la campagne déclarative 2016.

Les déclarations de résultats des entreprises clôturant leur exercice au 31 décembre 2015 devront être souscrites le 3 mai 2016 au plus tard.

MARS 2016

6.2 SIMPLIFICATION : ATTESTATION POUR LES TRAVAUX REALISES DANS LES LOCAUX ACHEVES DEPUIS PLUS DE 2 ANS

Les travaux portant sur des locaux d‘habitation achevés depuis plus de 2 ans peuvent, sous certaines conditions, être soumis au taux intermédiaire de 10 %, ou même au taux réduit de 5,5 % s‘il s‘agit de travaux d‘amélioration de la qualité énergétique des logements.

Pour bénéficier de l‘application de ces taux, le client doit remettre au prestataire, avant le commencement des travaux ou au plus tard au moment de la facturation, une attestation (modèles n° 1300-SD ou 1301-SD) visant à  garantir que les conditions d’application du taux intermédiaire ou du taux réduit sont satisfaites.

Ces attestations doivent, en principe, être produites à  chaque intervention d‘un prestataire de travaux.

Afin d’alléger la charge administrative pesant sur les clients et les professionnels, l‘administration admet toutefois que l’attestation simplifiée n° 1301-SD ne soit pas établie lorsque le montant des travaux pour réparation et entretien, toutes taxes comprises, est inférieur à  300 €. La facture doit comporter les informations suivantes : nom et adresse du client et de l’immeuble objet des travaux, nature des travaux et mention selon laquelle l’immeuble est achevé depuis plus de 2 ans.

6.3 CREANCE NEE DU REPORT EN ARRIERE DE DEFICITS (CARRY-BACK)

Le Conseil d‘Etat vient de trancher la question de savoir dans quel délai une demande de remboursement d‘une créance de report en arrière des déficits arrivée à  échéance doit être formulée.

Pour mémoire, la créance de report en arrière des déficits peut être utilisée pour le paiement de l’impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos au cours des cinq années suivant celle au cours de laquelle l’exercice déficitaire a été clos.
Au terme des 5 années suivant celle de la clôture de l‘exercice au titre duquel l‘option a été exercée, l‘administration doit en principe rembourser spontanément la créance, pour la fraction de la créance non utilisée.

A défaut de restitution spontanée, le contribuable doit solliciter la restitution de la créance.

La Haute Assemblée précise que cette demande de remboursement doit être formulée dans le délai de prescription quadriennale.

MARS 2016

6.4 INTERETS D‘EMPRUNT POUR RACHAT DE SES PROPRES TITRES

Dans un arrêt du 15 février 2016, le Conseil d’Etat s’est prononcé favorablement sur la possibilité pour une société de déduire de ses résultats imposables les intérêts d’emprunts contractés pour financer le rachat par la société de ses propres titres dans le but de les annuler et de permettre le retrait de l’un des associés.

En revanche, cette déduction peut être remise en cause si l’opération de rachat financée par les emprunts n’a pas été réalisée dans l’intérêt de la société.

6.5 PLUS-VALUES SUR TITRES

L’administration fiscale vient de modifier sa doctrine relative à  l‘application des abattements pour durée de détention portant sur les plus-values de cession de valeurs mobilières.

Ainsi :

  • « La moins-value subie au cours d’une année s’impute sur les plus-values

    imposables retenues avant application, le cas échéant, des abattements pour

    durée de détention.

  • « Les abattements pour durée de détention s’appliquent aux compléments de

    prix lorsque, à  la date de cession des titres, la condition de durée de détention est satisfaite, même si elle est antérieure à  2013 ou n’a pas dégagé de plus- value.

    En outre, elle apporte des précisions complémentaires sur le régime du report d’imposition automatique en cas d’apport de titres à  une société soumise à  l’impôt sur les sociétés contrôlée par l’apporteur :

  • « Pour l’application de la notion de contrôle de la société bénéficiaire de l’apport, il est fait masse des droits de vote ou des droits dans les bénéfices de la société concernée détenus, directement ou indirectement, par le contribuable, son conjoint, leurs ascendants, leurs descendants et leurs frères et sœurs, mais également des droits détenus par le partenaire lié au contribuable par un Pacs ;

  • « Lorsque les titres reçus en rémunération de l‘apport sont des obligations convertibles en actions, ou des obligations échangeables ou remboursables en actions et que le contribuable ne dispose pas, de ce fait, du contrôle de la société bénéficiaire de l’apport, l‘administration a la possibilité, dans le cadre de la procédure de l’abus de droit fiscal, de replacer, le cas échéant, cette opération d’apport dans le champ du mécanisme du report d’imposition prévu par l’article 150-0 B ter du CGI ;

  • « Pour l’appréciation du seuil de réinvestissement de 50 % du prix de cession, il doit être tenu compte du complément de prix ;

  • « Pour le bénéfice du report d’imposition, le réinvestissement ne peut pas être opéré dans des sociétés holdings n‘ayant qu‘une activité de gestion patrimoniale (holdings passives).